Plus de détail sur les changements dans le groupe Canal + sur le site de Libération :
Canal+ fait sa mue version Vivendi
Nouvel organigramme, nouvelle stratégie, nouveaux moyens : après sa prise de pouvoir dans la chaîne cryptée au début de l'été, Vincent Bolloré a détaillé jeudi sa feuille de route aux salariés.
Pour ceux qui en doutaient encore, Vincent Bolloré est bien le nouveau patron de Canal+. Et plus seulement dans les faits, comme le reflète son nouvel organigramme, dévoilé jeudi. Principal actionnaire de Vivendi, dont il préside le conseil de surveillance, Vincent Bolloré prend également la tête du conseil de surveillance de la chaîne cryptée.
Le message est clair : le nouveau Canal sauce Bollo est 100% intégré à Vivendi, dont la stratégie est recentrée autour des contenus. Même s’il garde un pied dans les réseaux avec Télécom Italia, dont il est devenu le principal actionnaire et dont il espère pouvoir tirer parti (comme avec l’opérateur Telefonica avec lequel Vivendi a passé des accords) pour mieux faire connaître son offre à l’international. Une reprise en main déjà largement entamée depuis juillet et le limogeage de son ex-directeur général Rodolphe Belmer – missionné depuis à France Télévisions par Delphine Ernotte - mais désormais effective et gravée noir sur blanc.
Il place ses hommes
S’il va s’investir «totalement» dans son nouveau rôle - «Quand on est nommé président d’un grand groupe, le plus facile est de faire peu pour ne pas déranger les habitudes et rester populaire […] ceci n’est pas dans mes habitudes», écrit-il dans un message adressé à l’ensemble des salariés -, l’homme d’affaires breton place également ses hommes à tous les étages : l’actuel président de Bolloré médias, Jean-Christophe Thiery, devient celui du directoire de Canal+ en remplacement de Bertrand Méheut, qui quitte les instances dirigeantes de Canal+ après y avoir passé treize années. Ce dernier reste toutefois dans le groupe : il sera chargé de «conseiller» Vincent Bolloré sur les futurs développements de Canal+, qui va pouvoir bénéficier de la très conséquente trésorerie de Vivendi d’environ 9 milliards d’euros.
Avec cette «intégration totale» de Canal+, dont la société éditrice (SECP) devient au passage une filiale à 100% de Vivendi, les principaux dirigeants du groupe deviennent également logiquement ceux de la chaîne, avec un secrétaire général ou un DRH qui seront communs aux deux entités. La chasse aux doublons est lancée.
Réinternaliser la fabrication des programmes
Terminé également la «concurrence entre les entités et les cloisons, insiste-t-il. Parlez-vous, échangez. Faisons-nous confiance ! Nous serons plus forts !» Le nouvel homme fort de Canal+ s’est dit à cet égard «choqué par le recours systématique à la sous-traitance alors qu’il existe des moyens internes». Une allusion codée au contrat mirifique qui liait le Grand journal, l’émission phare de la grille en clair, au producteur indépendant Renaud Le Van Kim pour un montant de 130 000 euros par émission. D’où la volonté de renforcer Vivendi dans la production et de réinternaliser la fabrication d’un certain nombre de programmes afin de mieux maitriser leurs coûts, surtout sur la grille en clair.
Sur le fond, Vincent Bolloré a également détaillé sa stratégie pour la chaîne. «Il a clairement pris les commandes et placé ses hommes, explique à Libération un cadre qui a assisté à sa présentation jeudi matin. Mais il a aussi commencé à être plus précis sur sa vision en insistant sur la nécessité de multiplier les passerelles à l’intérieur du groupe et la priorité accordée à l’abonné.» Alors que «la partie claire de Canal devra être réduite et donner à ceux qui la regardent l’envie, le désir de s’abonner», il faut, a t-il expliqué, «replacer notre abonné et sa satisfaction au cœur de nos préoccupations».
iTélé devient CNews
Les chaînes en clair D8, D17 et iTélé sont pour leur part rebaptisées C8, C17 et CNews. «Nous allons augmenter nos budgets d’investissement et les rendre transversaux entre les différentes chaînes, gratuites et payantes, ajoute Vincent Bolloré dans son message aux salariés. Nous allons investir plus dans le sport, qui est l’ADN de Vivendi, le cinéma, les flux, les news.»
Il a enfin promis que la chaîne disposerait de temps pour parvenir à des résultats. Bousculé dans le cinéma et les séries par la concurrence des nouveaux acteurs issus du Net, comme Netflix, et dans le sport par BeIn Sports, à l’origine d’un emballement du marché des droits sportifs, Canal+ perd des abonnés en France. Une baisse jusqu’ici compensée par la progression de ses abonnés à l’international comme au Vietnam, en Pologne ou en Afrique, un continent sur lequel le groupe Bolloré est très présent. Fort de ses près de 10 millions d’abonnés dans le monde, Canal+ a donc quelques années devant lui pour se réinventer. Car Vincent Bolloré sait que «les résultats seront surtout à terme». Dans une ultime allusion au passé, il a mis en garde contre «l’arrogance», qui «n’est pas un comportement qui permet d’avancer». Sa vision de feu l’esprit Canal ?
Source :
liberation.fr