Générique de fin pour le « Soir 3 » sur France 3
Le journal nocturne est transféré à partir du lundi 26 août sur la chaîne d’information en continu Franceinfo, au grand dam des organisations syndicales.
Le journal télévisé des couche-tard sera présenté pour la dernière fois sur France 3, dimanche 25 août. Dès le lendemain, le « Soir 3 » migrera sur les ondes de Franceinfo, la chaîne d’information en continu de France Télévisions, diffusée sur le canal 27. Il sera rebaptisé le « 23 heures ».
Présenté en mai par la direction du groupe, le transfert de ce journal emblématique lancé en 1978 a déclenché une fronde des organisations syndicales. Après deux débrayages en mai et en juin, six syndicats ont lancé un nouvel appel à la grève pour le lundi 26 août, jour de la première diffusion du « 23 heures » sur Franceinfo.
ls peuvent faire valoir le soutien de nombreux élus : près de quatre-vingts maires ruraux ont signé, en mai, une pétition pour demander le maintien du journal du soir sur France 3, et autant de députés ont adressé la même requête, le 25 juin, dans un courrier à la présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte, au premier ministre, Edouard Philippe, et au ministre de la culture, Franck Riester. « Elus des territoires, nous savons que la disparition de ce programme impactera la qualité d’information de nos citoyens (…). Quand on sait qu’en France il existe sept chaînes d’information permanente, le transfert de ce journal sur une chaîne d’information continue a encore moins de sens », écrivent-ils.
Signe que le projet est toutefois accepté en interne, selon Alexandre Kara, le directeur délégué à Franceinfo pour France Télévisions, « les grèves n’ont pas mobilisé, et la quasi-totalité des équipes du “Soir 3” [une dizaine de personnes] vont rester sur le canal 27 », où elles produiront le « 23 heures » avec celles de la chaîne d’information en continu. Son présentateur, Francis Letellier, n’a toutefois pas souhaité les suivre et sera remplacé par Patricia Loison. Ce journal s’intégrera dans une nouvelle plage d’information nocturne sur Franceinfo, animée entre 21 heures et minuit par Nathanaël de Rincquesen.
Rationalisation
Officiellement, cette bascule est motivée par l’horaire souvent tardif du « Soir 3 », variant selon la durée du programme précédent. Pour Eric Vial, secrétaire général de FO Médias, la « stratégie de la direction est surtout d’accélérer le développement de Franceinfo », dont les audiences peinent encore à décoller, trois ans après son lancement.
La disparition de France 3 de cette tranche d’information nationale intervient par ailleurs alors que le gouvernement souhaite tripler le volume de décrochages régionaux sur l’antenne, pour passer de deux à six heures par jour. C’est dans cette logique que s’inscrit la diffusion sur France 3 des matinales de la radio France Bleu. Après une expérimentation depuis janvier en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Occitanie, ce rapprochement sera généralisé aux quarante-quatre antennes de la station d’ici à 2022.
Certains voient aussi dans le passage du « Soir 3 » sur le canal 27 une logique de rationalisation, France Télévisions étant sommée par l’Etat de réaliser 350 millions d’euros d’économies d’ici à 2022. « On va se retrouver avec un journal appauvri, avec moins de reportages et d’analyses », redoute Claude Gueneau, secrétaire général adjoint SNJ-CGT. Lors de la présentation de rentrée de la chaîne Franceinfo, jeudi 22 août, Stéphane Dubun, le directeur, a au contraire tenu à rassurer : « On mutualise en gardant la même ligne éditoriale, les mêmes moyens techniques et humains, la même durée et les mêmes chroniques autour de l’Europe, la philosophie et l’innovation. »
Le pari est toutefois risqué. Tandis que le « Soir 3 » a rassemblé en moyenne chaque jour 527 000 fidèles cette saison, Franceinfo n’attire que 60 000 téléspectateurs à la même heure. Le transfert d’audience sera d’autant plus ardu que l’émission profitait bien souvent du succès des programmes qui la précédaient, à l’image de la série Capitaine Marleau. Surtout, Franceinfo souffre d’un « déficit de notoriété énorme », reconnaît M. Kara. « L’audience progressera mécaniquement au fur et à mesure qu’on sera connu », veut croire le directeur de Franceinfo, qui compte sur la promotion de ce nouveau rendez-vous sur les différentes chaînes de France Télévisions pour attirer les habitués du « Soir 3 ». Et atténuer, espère-t-il, le « handicap » de la numération de Franceinfo, 27, « que peu de gens connaissent » ou ont la patience d’atteindre en zappant.