Radio numérique terrestre: le CSA s’inquiètePublié le mercredi 10 mai 2017
Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a récemment sollicité le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) dans le cadre de la réforme - sensible - du décret "Services de médias audiovisuels" ou SMA (*). Objectif ? Encadrer le développement de la future radio numérique terrestre (RNT).
Le temps presse. Le déploiement technologique de la RNT doit s’effectuer en 2018 pour plusieurs raisons. D’une part, le nouveau contrat de gestion de la RTBF sera bouclé fin 2017. D’autre part, le CSA lancera un premier appel d’offres pour attribuer les nouvelles fréquences - FM et numériques - à la même période. Afin de faciliter la transition, il est prévu de procéder à une double diffusion (en FM et en DAB+) pendant une période comprise entre six et dix ans.
Le décret doit donc être rapidement révisé. Seulement, au-delà des aspects techniques, un article du décret divise la majorité PS-CDH.
Il s’agit de l’article 7 portant sur la pluralité des médias. Celui-ci définit notamment les critères utilisés par le CSA pour déterminer si un acteur exerce une "position significative sur le marché".
Qui détient quoi ?
Actuellement, quand un groupe de médias réunit plus de 20 % de part d’audience, une procédure d’alerte est enclenchée par le CSA (qui peut, ensuite, prendre des mesures). Toutefois, le PS souhaite rehausser ce seuil de 20 à 35 %. Contre l’avis du CDH. Il a également été question de remplacer la notion de "détention du capital" par celle de "contrôle" (au sens du Code des sociétés) pour déterminer l’appartenance à un groupe de médias.
C’est-à-dire ? Aujourd’hui, une simple détention - directe ou indirecte, majoritaire ou minoritaire - d’une part du capital suffit pour considérer qu’une personne physique ou morale "détient" un média. Demain, il faudrait atteindre 50 % du capital pour considérer que cette personne physique ou morale "contrôle" un média.
La majorité PS-CDH, divisée sur ces questions, a donc sollicité l’avis du CSA qui a, lui-même, consulté les principaux éditeurs de service radio concernés à travers des groupes de travail. Leur position, consignée en détails dans un avis, est sans appel : "Tel qu’envisagé, le projet de réforme aurait pour conséquence de permettre aux groupes médias de se concentrer davantage à l’intérieur du paysage audiovisuel belge francophone, indiquait hier le CSA par voie de communiqué. Il renoncerait à l’objectif de pluralisme structurel et donc à l’indépendance et à l’autonomie des médias. Enfin, le projet complexifierait et diminuerait le rôle du CSA dans le contrôle du pluralisme des médias."
Maintenir les balises actuelles
A l’exception du groupe Cobelfra/Inadi (Radio Contact et Bel RTL), le secteur "est favorable à un maintien des balises actuelles, qui garantissent le pluralisme des médias en Fédération Wallonie-Bruxelles", poursuit le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
En d’autres termes, le CSA souhaiterait conserver son droit de refuser l’octroi d’une fréquence supplémentaire à un groupe exerçant une "position significative". En contrepartie, l’organe de régulation pourrait toutefois assigner un autre réseau que celui sollicité (un réseau urbain à la place d’un réseau communautaire; une place dans un multiplex DAB+ au lieu d’une fréquence FM).
Les enjeux sont considérables : une concentration trop forte des médias menacerait directement la transparence, la diversité et l’indépendance de l’information.
Comme nous le confiait Eric Adelbrecht (directeur des radios RTL) il y a un an, Mint sera candidate à une licence numérique. Tout comme Chérie FM (relancée par le groupe NRJ/Nostalgie sur Internet). La RTBF n’est pas en reste, puisqu’elle proposera une radio destinée à la génération Z (née après 1995) des grandes villes.
Dès lors que trois groupes pourront concentrer l’ensemble des parts de marché, que restera-t-il de Fun Radio ou de DH Radio ? Quelle sera la place accordée aux réseaux provinciaux, aux radios indépendantes et communautaires ?
Toujours est-il que le gouvernement doit - incessamment - remettre un projet de révision du décret SMA. Reste à voir s’il suivra l’avis du secteur et du CSA.
--> Notes : (*) Le décret SMA régule l’audiovisuel belge francophone.
L’avis complet du collège d’avis du CSA :
http://bit.ly/2pkKFQe La note de synthèse adressée au gouvernement :
http://bit.ly/2r2opI6Moreau Aurélie